La gazette du carbone

Pour un arsenal juridique décarbonant
The Shifters - Les bénévoles du Shift Project

Chaque semaine, nos propositions tirées de l’expertise du Shift Project pour intégrer les enjeux climatiques au débat parlementaire.

2024 | Semaine 43

Chère lectrice, cher lecteur,

Cette semaine, nous vous proposons la seconde partie de notre série d’articles sur la responsabilité élargie des producteurs.

Bonne lecture !

Sommaire

Réflexions décarbonées

Réflexions décarbonées

La Responsabilité élargie des producteurs de la filière bois : de nécessaires réaménagements en cours

Dans notre précédent article, nous avons vu comment, depuis le 1er janvier 2023, le principe de la Responsabilité élargie des producteurs (REP)1 se préoccupe de l’impact des produits manufacturés sur l’environnement sur l’ensemble de leur cycle de vie, s’applique également aux acteurs fabricants ou producteurs de produits et matériaux de construction du bâtiment (PMCB). Dans ce cadre, la REP s’articule autour de deux principes législatifs majeurs :

  1. la reprise sans frais des déchets issus des PMCB, lorsqu’ils font l’objet d’une collecte séparée ;
  2. le rôle central des éco-organismes, tenus à la fois de couvrir les coûts de la reprise des déchets et de pourvoir à cette reprise lorsque cela est nécessaire.

Une autre problématique semble émerger dans le secteur du bois

Les députés républicains M. Gaultier2 et M. Habert-Dassault3 ont voulu tous deux le 21 mai 2024, de leur côté, interroger le même ministre à propos des effets économiques et des inégalités des éco-contributions de la REP au sein du secteur des matériaux de construction.

Les barèmes 2024 utilisés pour le calcul de l’éco-contribution ont enregistré de fortes augmentations, notamment pour les produits en bois. De plus, l’éco-contribution dans le secteur du bois s’applique même aux scieurs qui ne sont bénéficiaires d’aucun service. Ils doivent désormais payer une taxe additionnelle qui contribue à faire augmenter les prix, alors qu’ils ne génèrent pas de déchets. Or, dans le même temps, les grilles concernant les matériaux non bio-sourcés, tels que l’acier ou le PVC, ont évolué de façon moins importante.

Pourtant, les produits en bois devraient être privilégiés dans le secteur des constructions au vu de leur cycle de vie plus vertueux, de leur caractère biosourcé et de leurs caractéristiques de stockage carbone.

Le ministère de la Transition écologique a publié à cet égard deux réponses les 4 et 11 juin 2024, guère convaincantes. Il justifie tout d’abord les augmentations des éco-contributions par la nécessité de développer le réseau de points de collecte. Il explique dans un second temps que le cadre réglementaire a été depuis ajusté afin de rétablir une certaine équité des contributions entre les produits en bois issus de scieries, fabriqués principalement en France, et les préfabriqués qui sont souvent importés. De fait, un taux d’abattement applicable au bois avec un taux d’humidité supérieur à 20% a été récemment introduit grâce à l’arrêté du 2 février4, ciblant notamment les produits issus de scieries : ce nouveau taux devrait permettre une réduction de la participation des scieurs d’environ 100 M€ en 2024. Enfin, un autre projet d’arrêté ministériel5 soumis à consultation aurait effectivement prévu d’instaurer un abattement de 50% des contributions pour les matériaux dont les taux de collecte et de recyclage étaient supérieurs aux objectifs fixés dans le cahier des charges.

En revanche, il n’est malheureusement pas prévu à ce stade de davantage prendre en compte la dimension parfois très locale et fragmentée de ce secteur du bois, ce qui devrait pourtant conduire à impliquer les petits et moyens acteurs dans tout projet. Il conviendrait également d’ajuster les dispositifs réglementaires afin de privilégier des matériaux moins impactants et d’orienter vers une réduction à la source du déchet.

1 Responsabilité élargie des producteurs. Il s’agit de dispositifs particuliers d’organisation de la prévention et de la gestion de déchets qui concernent certains types de produits. Ces dispositifs reposent sur le principe selon lequel les producteurs peuvent être rendus responsables du financement ou de l’organisation de la prévention et de la gestion des déchets issus de ces produits en fin de vie, en référence au principe pollueur-payeur.

2 Question n°17851 : REP PMCB et filière bois – Assemblée nationale

3 Question n°17852 : Situation délicate du secteur du bois dans la REP PMCB – Assemblée nationale (assemblee-nationale.fr)

4 Cahier des charges des éco-organismes de la filière à responsabilité élargie du producteur des produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment.

5 Projet d’arrêté ministériel

▲ Sommaire

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