La gazette du carbonePour un arsenal juridique décarbonant |
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Chaque semaine, nos propositions tirées de l’expertise du Shift Project pour intégrer les enjeux climatiques au débat parlementaire.
2022 | Semaine 29Deux salles, deux ambiances. |
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Questions émissionsVu dans la presse |
Questions émissions |
Lutte contre l'illectronisme et numérisation des services publicsPortée par M. Stéphane Buchou (LREM) Cette question écrite du député M. Stéphane Buchou soulève le problème de l’exclusion engendrée par la numérisation des démarches administratives et nous rappelle que, d’après l’INSEE, 17% des Français sont concernés par l’illectronisme1 : une incapacité ou une impossibilité matérielle de se servir d’outils numériques. L’essor du numérique pour tous constitue un enjeu majeur pour l’intérêt économique général. En parallèle, la croissance de l’empreinte énergétique directe du numérique est insoutenable : +6% par an au niveau mondial. Dans son rapport sur l’impact environnemental du numérique, The Shift Project souligne que près de 3,5 % des émissions mondiales de carbone étaient dues à la production et à l’utilisation des systèmes numériques en 2019. Cette part pourrait doubler d’ici 2025 pour atteindre 7 % du total. À l’échelle de la France, les résultats de la mission commune ADEME-ARCEP2 publiés en janvier 2022 indiquent que l’empreinte carbone des « biens et services du numérique » représente actuellement 2,5 % du total de l’empreinte carbone annuelle, soit 16,9 Mt CO2 eq. Le rapport souligne également qu’ils représentent environ 10% de la consommation électrique annuelle de la France. La lutte contre l’illectronisme doit donc viser également la sobriété et la décarbonation du numérique, comme nous le montrons au travers de quelques exemples. 1. Développer le secteur du reconditionné3 La fabrication et la distribution des terminaux sont les postes d’émissions de GES les plus importants du secteur du numérique (79% de l’empreinte carbone annuelle2 du numérique en France). Structurer le marché des terminaux reconditionnés devrait permettre d’augmenter l’offre de terminaux à bas coût tout en réduisant leur impact environnemental. 2. Insister sur la notion de sobriété dans les formations (pour un “usage du numérique écologiquement vertueux” selon le Sénat) Parmi les multiples sujets de sensibilisation des plus jeunes doivent figurer les notions de sobriété et d’empreinte environnementale du numérique. La loi du 15 novembre 2021, visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique en France (REEN), a intégré cette obligation en modifiant le code de l’Éducation dans sa partie relative à la formation aux outils et usages du numérique dans les écoles. Les enjeux sont collectifs : orienter les usages du numérique vers les fonctions utiles aux défis du siècle, limiter les consommations énergétiques du secteur… Ils sont aussi individuels : réduire les dépenses et la facture d’électricité à la fin du mois. Les outils pédagogiques à mettre en place visent le milieu scolaire mais aussi les parents. 3. Rendre obligatoire l’adoption de directives d’accessibilité du contenu web (WCAG 2.04) Ces directives sont conçues pour alléger le poids des pages web et adapter les interfaces à certains handicaps. Plusieurs recommandations rejoignent la logique de sobriété : préférer les contenus textuels aux contenus vidéos, diminuer le poids des images, permettre la désactivation des animations, etc. Il existe déjà le référentiel général d’amélioration de l’accessibilité (RGAA) dans la réglementation française, en déclinaison du WCAG. Il s’impose aux service numériques publics et privés. Il est toutefois partiellement appliqué car techniquement assez difficile à mettre en œuvre. Ce référentiel entre bien en synergie avec le référentiel d’éco-conception des services numériques, une démarche portée au niveau interministériel par la direction des services éco-responsables5. 4. Améliorer l’accessibilité des ressources administratives La dématérialisation des procédures administratives peut être perçue comme un moyen de simplifier les relations entre l’administration et l’usager. Toutefois, la fermeture des lieux d’accueil des usagers peut créer une fracture numérique amenant parfois au non-recours aux droits de certains publics réfractaires à ces changements ou tout simplement mal informés, voire non formés. Il en est de même pour le recours aux soins. Dans son rapport sur la décarbonation de l’administration publique, The Shift Project indique que trois conditions doivent être remplies pour privilégier la dématérialisation de tous les services administratifs : il faut « que les infrastructures le permettent, que tous les usagers en maîtrisent les usages et qu’il reste possible d’avoir des relations non digitalisées quand le besoin s’en fait sentir ». Cela implique :
Par ailleurs, dans le cadre du Plan de relance de l’État, des moyens ont été alloués pour l’amélioration et la modernisation des services numériques avec pour but, notamment, leur mise en accessibilité pour les personnes handicapées. La simplification des instructions contenues dans les services numériques doit par ailleurs être améliorée. The Shift Project souligne également, dans son autre rapport « Déployer la sobriété numérique », qu’il est indispensable d’intégrer la dimension environnementale dans le pilotage stratégique et opérationnel de tout projet en lien avec le numérique (projets connectés notamment). Dans le cas de la lutte contre l’illectronisme, il est important d’adopter la sobriété numérique comme principe d’action et de ne pas oublier qu’un choix technologique est un choix sociétal (nouveaux usages, influence sur d’autres activités). Sans réflexion de cette nature, tout déploiement d’outils numériques risque de gâcher les opportunités de placer la transition numérique au service des défis physiques et sociétaux de ce siècle. 1 www.insee.fr/fr/statistiques/4241397 2 Étude Ademe – Arcep « Évaluation de l’impact environnemental du numérique en France et analyse prospective” de janvier 2022 – www.arcep.fr/uploads/tx_gspublication/etude-numerique-environnement-ademe-arcep-note-synthese_janv2022.pdf 3 www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000045185223 4 www.w3.org/Translations/WCAG20-fr/ 5 www.modernisation.gouv.fr/communautes/services-publics-ecoresponsables Liens utiles : |
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Trois chantiers pour décarboner la logistique en Auvergne-Rhône-AlpesArticle publié par Actu-Transport-Logistique.fr « Initiée par le Pôle d’Intelligence Logistique, soutenue par l’ADEME, le Plan Rhône et l’Union européenne, la démarche Ligne verte vise à comprendre pourquoi les transports ferroviaires et fluviaux sont si peu utilisés en Auvergne-Rhône-Alpes et à créer les conditions de l’évolution de ces politiques d’achat de transport, en se concentrant plus spécifiquement sur le post-acheminement des containers maritimes entre le Grand Port maritime de Marseille et la région logistique de Lyon, dont les volumes sont en croissance. » Pour rappel, le transport routier en France en 2017 représente 88% des volumes transportés, le ferroviaire, 10%, et le fluvial, 2%1. La démarche « Ligne verte » et la décarbonation du fret La Ligne verte se donne trois chantiers :
Une chaîne logistique efficace nécessite une massification des flux, qui elle-même n’est possible qu’avec une bonne connaissance des flux. Or, les données concernant le transport de marchandises sont très peu nombreuses. Depuis 1990, seulement 5 enquêtes ont été réalisées sur les flux de marchandises en ville2. Le partage collaboratif de données organisé par la Ligne verte permettra d’identifier les places disponibles, tracer les conteneurs en temps réel et consolider les données de flux. Que dit The Shift Project ? The Shift Project confirme l’intérêt d’un transport de marchandises massifié et d’un report sur la voie fluviale. Dans le chapitre consacré au fret de son Plan de Transformation de l’Économie Française (PTEF), le Shift recommande une augmentation du remplissage sur la route. Deux moyens sont mis en avant : « la mutualisation systématique des flux et des trajets » et la « réduction des cadences de transport, pour transporter plus et moins souvent ». Cependant, il reste qu’il est nécessaire de privilégier les alternatives à la route, dès à présent. En effet, les ordres de grandeurs sont toujours en défaveur du transport routier : « Même sans avancée technologique, tout transport autre que routier thermique permet de décarboner. […] Une barge Freycinet est équivalente à 30 poids lourds, tandis qu’une barge Grand Rhénan déplace autant de marchandises que 100 poids lourds, pour une division du taux d’émissions de CO2 par tkm allant de 2 à 5. » Dès lors, si l’initiative « Ligne verte » rhodanienne doit être saluée, il est dommage qu’elle se limite à l’axe, certes structurant, Marseille-Lyon. Une même démarche est nécessaire au niveau national pour permettre une plus grande massification des flux et ainsi réaliser une véritable avancée dans la décarbonation du transport de marchandises. 1 www.pole-intelligence-logistique.fr/le-pole-dintelligence-logistique-lance-la-ligne-verte/ 2 www.senat.fr/rap/r21-636/r21-6361.pdf Liens utiles : |
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