La gazette du carbone

Pour un arsenal juridique décarbonant

The Shifters - Les bénévoles du Shift Project

Chaque semaine, nos propositions tirées de l’expertise du Shift Project pour intégrer les enjeux climatiques au débat parlementaire.

2022 | Semaine 18

Les chanceux.ses ! Nos lecteurs.trices découvriront cette semaine la France rurale, celle où les animaux de la ferme broutent en liberté, les carottes poussent et… les sécheresses répétées compromettent notre sécurité alimentaire, pendant que le bois de chauffage cause des maladies respiratoires (9% de la mortalité en France). Dans la Gazette du carbone, nous vous donnons quelques conseils de Shifters pour une transformation en profondeur. Bonne lecture !

Sommaire

Questions émissions

Questions émissions

en partenariat avec Logo Dixit

Chauffage au bois en France et pollution atmosphérique

Portée par M. Robin Reda (Les Républicains - Essonne)

Le député Robin Reda interroge la ministre de la transition écologique sur l’impact sanitaire des particules issues de la combustion du bois. Il lui demande de quelle manière elle envisage d’améliorer les connaissances sur l’impact sanitaire des particules issues de la combustion du bois, afin de sensibiliser davantage les particuliers sur la pollution de leur environnement. De plus, il demande comment, en pratique, elle compte encadrer, dans les zones très polluées, l’utilisation du chauffage au bois au-delà du remplacement progressif des appareils les plus polluants.

Le secteur résidentiel est à l’origine d’une part significative de la pollution de l’air, notamment à cause de la combustion de la biomasse. En effet, au niveau national, on lui doit 83% des émissions de HAP (hydrocarbures aromatiques polycycliques), 68% des PM1 (particules ultrafines, diamètre 1 micron), 53% des PM2,5 (particules fines, diamètre inférieur à 2,5 microns), 43% du CO (monoxyde de carbone), 32% des PM10 (particules fines, diamètre inférieur à 10 microns) et de 16 à 20% de certains métaux lourds1. Particulièrement en hiver, la combustion de biomasse peut être à l’origine de pics de pollution aux particules fines : le chauffage individuel est, par exemple, responsable de 65% des émissions de PM10 lors des jours de grand froid en Auvergne-Rhône-Alpes2. En baisse depuis 1990, la pollution de l’air demeure néanmoins un problème majeur de santé publique, responsable de 9% de la mortalité en France (48 000 victimes par an)3.

Malgré ces constats, la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) 2023-2028 entend augmenter la part de la biomasse de 30 à 40% par rapport à 2017 (de 120 TWh à 157-169 TWh)4, soit 10 à 11 millions de logements en 20285 contre 7 millions en 20176. Cette augmentation s’explique par le fait que la biomasse, par rapport aux énergies fossiles, peut s’inscrire dans un cycle fermé, à condition que le rythme des nouvelles plantations soit suffisant pour compenser le carbone émis au moment de la combustion. Elle participe donc à la décarbonation de la production de chaleur, sous réserve d’une gestion durable de cette biomasse. Il convient autant que possible de privilégier la biomasse de récupération (sous-produits industriels, bois issu de l’entretien des espaces verts…). La ressource en bois doit pouvoir être utilisée en priorité en tant que stockage carbone, au niveau des forêts, ou en tant que bois de construction par exemple.

De son côté, The Shift Project préconise, dans son plan de transformation de l’économie française (PTEF), la rénovation des logements énergivores afin de faire baisser les besoins en énergie pour le chauffage. Il conseille également de limiter le recours au bois : les chaudières à bois et inserts bois peuvent être utilisées dans les maisons individuelles mais dans une proportion réduite par rapport aux pompes à chaleur (PAC) et PAC hybrides. De même, le chauffage électrique à effet Joule doit jouer un rôle mineur. Pour le logement collectif, le PTEF privilégie les réseaux de chaleur urbains et, dans une moindre mesure, le chauffage à effet Joule, les PAC et PAC hybrides ainsi que les chaudières à gaz. La biomasse est envisagée pour moins de 10% des logements collectifs en 2050.

Une étude in situ de l’ADEME7 nous éclaire sur l’impact du renouvellement des appareils sur les émissions de polluants et les rendements. Lors du remplacement d’un appareil ancien par un appareil récent (label Flamme Verte), les gains de rendement et les réductions des émissions polluantes obtenus sont en moyenne les suivants :

  • Lors du renouvellement d’un appareil ancien par un appareil à bûches récent :
    • Rendement : gain de 16 points ;
    • CO (monoxyde de carbone) : réduction de 41% des émissions ;
    • Particules totales : réduction de 57% des émissions.
  • Lors du renouvellement d’un appareil ancien par un appareil à granulés :
    • Rendement : gain de 34 points ;
    • CO (monoxyde de carbone) : réduction de 87% des émissions ;
    • Particules totales : réduction de 44% des émissions.

En 2018, environ 37% du parc de chaudières à bois avait moins de 5 ans, limitant ainsi l’utilisation de la ressource bois et permettant de diminuer fortement l’impact du chauffage au bois sur la qualité de l’air, essentiellement lié aux foyers ouverts. Ces derniers ont un impact élevé en termes d’émissions de polluants et sont majoritairement utilisés en chauffage d’agrément et de loisir. Leur nombre est en diminution constante6.

Ainsi, l’utilisation de la biomasse pour la production de chaleur participe à la diminution des émissions de gaz à effet de serre mais sa combustion peut avoir des effets néfastes sur la santé humaine via l’émission de polluants atmosphériques. Elle doit donc être utilisée comme une solution de complément dans les zones non soumises à des problèmes de qualité de l’air, notamment à des pics de pollution aux particules.

1 Rapport Secten CITEPA 2021 : www.citepa.org/wp-content/uploads/publications/secten/Citepa_Rapport-Secten_ed2021_v1_30072021.pdf

2 Chauffage au bois et qualité de l’air | Atmo Auvergne-Rhône-Alpes : www.atmo-auvergnerhonealpes.fr/article/chauffage-au-bois-et-qualite-de-lair

3 Santé publique France Air et santé : risques pour la santé : www.santepubliquefrance.fr/determinants-de-sante/pollution-et-sante/air/articles/pollution-atmospherique-quels-sont-les-risques

4 Synthèse Programmation pluriannuelle de l’énergie 2019-2023 2024-2028 : www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/20200422%20Synthe%CC%80se%20de%20la%20PPE.pdf

5 Plan d’action chauffage au bois : www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Plan%20d%27action%20chauffage%20au%20bois.pdf

6 ADEME, Solagro, Biomasse Normandie, BVA, 2018. Étude sur le chauffage domestique au bois : Marchés et approvisionnement: librairie.ademe.fr/cadic/874/2_chauffage_domestique_bois_appro_synthese.pdf

7 INERIS, 2019. Impact du renouvellement d’appareils non performants de chauffage domestique au bois sur les émissions de particules : www.bioenergie-promotion.fr/wp-content/uploads/2019/11/rapport-impact-renouvellement-appareils-chauffage-bois-emissions-particules.pdf

Liens utiles :

▲ Sommaire

Crainte d'une précoce et importante sécheresse dans les départements du Sud de la France en 2022

Portée par Mme Françoise Dumont (Var - Les Républicains)

Si le monde agricole a toujours été soumis aux aléas météorologiques, il est aujourd’hui confronté à des changements climatiques particulièrement intenses et défavorables. Or les épisodes de sécheresses qui se répètent sur le territoire depuis a minima quatre années ont vocation à se répéter. Les modèles climatiques estiment en effet que les niveaux moyens de sécheresse des sols agricoles seraient en 2050 équivalents aux pires niveaux de sécheresse d’aujourd’hui sur une large partie du territoire.

Par une question écrite, Mme Françoise Dumont interroge le Gouvernement sur les moyens qu’il entend mettre en place pour répondre aux risques de perte agricole qui résulteraient d’une précoce et importante sécheresse dans les départements du Sud de la France en 2022.

Solutions existantes

Si des aides ponctuelles sont indispensables au soutien aux agriculteurs, il est nécessaire de modifier notre système agricole et alimentaire afin que celui-ci devienne résilient. C’est à cette fin que le volet « Transition agricole, alimentation et forêt1 » du plan France Relance doté d’une première enveloppe de 70 millions d’euros pour l’acquisition individuelle d’équipements de protection face aux aléas climatiques, s’est vu accorder un nouveau budget de 60 millions d’euros et l’on parle déjà d’un futur budget de 50 millions d’euros. Grâce à ces deux premières vagues de soutien, 4000 projets d’acquisition individuelle tels que des systèmes d’irrigation contre la sécheresse ont pu être financés.

Par ailleurs, d’un point de vue assurantiel, une meilleure couverture des risques climatiques pesant sur les agriculteurs sera possible à compter du 1er janvier 2023 grâce à la loi n° 2022-298 du 2 mars 20222 qui prévoit les orientations relative à une meilleure diffusion de l’assurance récolte en agriculture et qui prévoit une réforme des outils de gestion des risques climatiques en agriculture.

Pistes d’actions proposées par les Shifters

Si un soutien financier aux agriculteurs est indispensable pour faire face à ces dérèglements climatiques, il est néanmoins nécessaire de rendre notre système agricole et alimentaire davantage résilient aux épisodes de sécheresse. Dans ses travaux sur le sujet, The Shift Project préconise notamment de généraliser les pratiques agroécologiques dont l’un des grands principes est l’usage économe des ressources (eau, engrais, énergie), ainsi qu’une meilleure protection des milieux (eau, sols, biodiversité).

Afin de démocratiser de telles pratiques, le Plan de transformation de l’économie française (PTEF) recommande également d’allouer des efforts substantiels de recherche à l’adaptation des cultures et des élevages à ces nouvelles conditions et notamment concernant les sujets suivants :
  • La conception des rotations culturales et l’optimisation de la balance entre les besoins en eau des cultures et la contribution à la sécurité alimentaire ;
  • Le rôle des arbres dans l’adaptation des parcelles cultivées aux fortes chaleurs et aux sécheresses ;
  • L’optimisation des stratégies locales de gestion de la ressource en eau en fonction de la nature des nappes et du régime des précipitations (stockage dans les sols ou en surface, aménagement du paysage ou des cours d’eau, etc.) ;
  • Les modes de gouvernance autour de la ressource en eau, anticipation et gestion des conflits d’usage.

1 agriculture.gouv.fr/telecharger/118611?token=a44277e16ca210e483e822b4d6e131f77d9735e9c3d9b87cd95d289f2ccaa3a3

2 www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000045287633

Liens utiles :

▲ Sommaire

La gazette du carbone résulte du travail des bénévoles de l'association The Shifters, essentiellement réalisé sur la base de l’expertise du Shift Project. Son objectif est d'informer sur les opportunités que présente l'arsenal juridique français pour décarboner notre société.
N’hésitez pas à faire suivre largement le lien d’abonnement de cette publication à tout⋅e personne intéressé⋅e et/ou susceptible d’influencer le débat parlementaire !

Pour réagir au contenu, demander des précisions, proposer des évolutions, contribuer à notre action vers les décideurs, une seule adresse : gazette@theshifters.org !

Vous pouvez également découvrir The Shift Project et devenir membre de l'association.

Se désinscrire de la gazette du carbone