La gazette du carbonePour un arsenal juridique décarbonant |
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Chaque semaine, nos propositions tirées de l’expertise du Shift Project pour intégrer les enjeux climatiques au débat parlementaire.
2021 | Semaine 28Deux questions cette semaine : Comment concrètement évaluer l’efficacité du travail du législateur vis-à-vis des enjeux climatiques? Et une plus abstraite, mais pas moins importante : comment la loi aborde-t-elle l’addiction aux écrans, question intimement liée aux émissions toujours croissantes émanant des usages du numérique? |
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Notre sélection de la semaine |
Notre sélection de la semaine |
Évaluer pour évoluer : l’évaluation climatique des lois, un levier pour la transition environnementaleProposition portée par Erwan BALANANT, Delphine BAGARRY, Jean‑Noël BARROT, Philippe BERTA, Annie CHAPELIER, Sylvie CHARRIÈRE, Jean‑Charles COLAS‑ROY, Loïc DOMBREVAL, Yolaine de COURSON, Jennifer DE TEMMERMAN, Michèle de VAUCOULEURS, Frédérique DUMAS, M’jid EL GUERRAB, etc. Dans son rapport annuel 20201, le Haut Conseil pour le Climat rappelle la nécessité de mettre en place une évaluation climatique des lois, la situation ayant peu évolué depuis son dernier bilan (4% des articles évalués, soit une progression d’un point). Un impératif, dans un contexte où la France va devoir amplifier ses efforts de réduction des émissions de GES. En réponse à cet enjeu, une trentaine de députés ont déposé le 28 juin une proposition de loi ordinaire sur l’évaluation climatique des lois. Elle vient compléter des propositions de loi constitutionnelle et organique sur le bureau de l’Assemblée et apporte un éclairage attendu sur un dispositif ambitieux, qui doit ancrer les enjeux environnementaux au cœur des débats parlementaires. Les mesures de la proposition de loi ordinaire Pour compléter les études d’impact ex-ante et ex-post, une évaluation des lois adoptées est prévue dans les rapports d’évaluation parlementaires 18 mois à 3 ans après leur promulgation. Initiative intéressante, mais une évaluation annuelle aurait permis un pilotage plus resserré. Enfin, un rapport du gouvernement devrait se pencher sur un principe d’irrecevabilité climatique pour écarter les textes législatifs manifestement défavorables au respect des budgets carbone. Les questions qui restent à instruire pour améliorer l’alignement des politiques publiques sur les objectifs climatiques : Engager l’adaptation 1 Renforcer l’atténuation, engager l’adaptation, HCC, juin 2021 2 Schéma Régional d’Aménagement, de Développement Durable et d’Egalité des Territoires 3 Schéma régional Climat Air Energie : en l’absence de SRADDET dans certaines régions de France, il définit les objectifs et orientations en matière de réduction des émissions de GES en IDF, Corse et territoires ultramarins 4 Outils juridiques : leviers, difficultés, perspectives, Climalex, 2021 www.hautconseilclimat.fr/publications/evaluer-les-lois-en-coherence-avec-les-ambitions |
"L'économie de l’attention" et l'empreinte environnementale du numériqueProposition portée par Patrick CHAIZE, Guillaume CHEVROLLIER, Jean-Michel HOULLEGATTE, Hervé MAUREY, Jean-François LONGEOT, Didier MANDELLI, Joël BIGOT, Ronan DANTEC, Guillaume GONTARD, Mme Nadia SOLLOGOUB, M. Patrick KANNER, Mme Catherine DEROCHE, etc. Prenons les transports en commun et observons l’activité souvent addictive et inconsciente des voyageurs sur leur téléphone : avec en moyenne 6h54 de connexion chaque jour, un individu passe 42% de son temps d’éveil sur un écran. La présence croissante du numérique dans notre quotidien a amené un terrain fertile aux concepteurs de produits numériques qui ont poussé à son extrême un modèle économique basé sur une ressource rare : notre attention. Des techniques dites de “captation de l’attention”, prenant appui sur le pré-paramétrage de notre attention et la standardisation des produits (notifications permanentes, scroll infini, lancement automatique de vidéos, etc.), sont développées pour « fidéliser » les utilisateurs et monétiser les données liées à leur comportement, avec un recueil de leur consentement souvent opaque. Ces stratégies ont des effets indéniables : elles perturbent qualitativement l’orientation de l’attention en raison des effets quantitatifs autorisés par les vecteurs numériques (rapidité, partage, inclusion). Les impacts sont majeurs, notamment chez les plus jeunes. Surtout, elles surdéterminent nos valorisations collectives et alimentent un système d’usages qui génère des flux de données toujours plus importants. Les gains d’efficacité énergétique des réseaux et des data centers sont ainsi annulés par des effets rebonds. Comment la loi visant à « Réduire l’Empreinte Environnementale du Numérique », votée en 1ère lecture à l’Assemblée Nationale, aborde-t-elle la question ? On salue l’inclusion explicite de la limitation du recours aux stratégies de captation dans un article qui instaure un référentiel d’écoconception des services numériques. Cette orientation est en adéquation avec les leviers mentionnés par The Shift Project . Mais sans obligation de décliner ce référentiel, elle a peu de chance d’infléchir les tendances. Pour appréhender une problématique aussi vaste, dont les conséquences sont encore peu connues et maitrisées du grand public, une réponse technique ne semble pas suffisante. Comme le propose un amendement du Shift Project discuté en séance, une approche transdisciplinaire est nécessaire pour analyser les conditions d’émergence de la crise attentionnelle et traiter la question dans toutes ses dimensions – environnementale, mais aussi économique, sanitaire et sociale. Penser la donnée comme un bien commun et ouvrir un débat public sur nos usages du numérique : des mesures de régulation s’imposent afin d’éviter que notre attention, parasitée, ne prenne le chemin du pétrole il y a un siècle. Pour aller plus loin : L’écologie de l’attention, Yves Citton, 2014 Liens utiles : |
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